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Faire rêver avec votre magie…

 

Si on désire faire rêver ses publics futurs, je crois essentiel d’être conscient qu’il est indispensable de pouvoir rêver soi-même avant et pendant ses futures prestations.

Pour pouvoir rêver « publiquement » et sur commande, il devient nécessaire d’être bien dans sa peau ou suffisamment pour donner tout aux autres.

Une personne qui manque d’expérience, une personne renfermée, une personne trop tournée vers son nombril… peut difficilement donner du bonheur si la technique magique est approximative, faute d’être connue sur le bout des doigts.

La personne renfermée aura toutes les difficultés du monde pour s’ouvrir aux autres, alors qu’elle piétine sans cesse en elle-même.

L’égocentrique patenté qui ne pense à rien d’autre qu’à lui-même aura toutes les peines pour emmener avec lui son auditoire vers ce qu’il attend de toutes ses forces : oublier sa journée, ses tracas, son propre ego qui le plombe, le fatigue, l’épuise.

Intimiste 2 A

Nous serions des guitaristes débutants qui essaient d’épater la famille et quelques amis… nous serions très proches des apprentis magiciens.

Le débutant qui achète quelques tours et les exécute professionnellement quelques jours ou heures plus tard ressemble au pauvre guitariste « familial » cité plus haut.

Mais il est vrai que, connaissant moins la magie, le public est plus réceptif aux « magiciens/guitaristes » qu’aux musiciens de pacotille, vu que le public a l’habitude de voir depuis des décennies de vrais musiciens.

Nous sommes à la fois en train de tuer une certaine spontanéité du public qui est souvent déçu par ce qu’il voit et, dans le même temps, nous sommes en train de bâtir ce qui devient véritablement l’art magique.

Nous verrons dans les années qui viennent si mon analyse est erronée ou non.

Dans les débuts de la télévision, il y a déjà beaucoup d’années, le fait de voir et d’entendre un guitariste jouer de son instrument et chanter, ravissait l’œil et l’oreille de tous les téléspectateurs, avides d’images et de son. Plus les années ont passé, plus le même téléspectateur est devenu exigeant quant à la qualité de ce qu’il voit et entend.

Nous sommes dans la même composante avec la prestidigitation. Plus les années passent et plus nous voyons de magie sur l’écran. Plus on demande de magie pour des soirées événementielles… et plus souvent la qualité n’est pas toujours au rendez-vous.

Mais comme la magie est très prisée, le public discerne davantage les bons des moins bons voire des mauvais magiciens. La sélection naturelle est en train de s’opérer et c’est une très bonne chose, non ?

En musique il est effectivement difficile de tromper, même un profane : on ne peut pas se planquer derrière son instrument puisque par principe c’est la personne qui « donne vie » à l’instrument…

Cela montre que plus le temps passe, plus nous attendons d’un magicien qu’il soit un artiste, qu’il donne vie lui aussi à des émotions.

Le magicien qui se contente d’aligner des effets est en train de couper lui-même la branche sur laquelle il est assis.

On attend de plus en plus de voir de la magie dans le sens d’un vrai spectacle complet.

Il ne viendrait pas à l’idée d’un grand nombre de payer sa place pour voir un guitariste qui passe dans un restaurant pour quelques euros !!!

Le Double Fond, notre café-théâtre dédié à la magie, a permis, à son petit niveau, de créer un réel besoin et a fabriqué un réel public qui vient voir de la magie. Ce public paie pour venir voir des artistes et attend d’assister à de vrais spectacles.

Je pense que ces initiatives vont dans le sens de donner au public l’envie d’aimer de plus en plus la magie de close-up et de salon. Des initiatives comme celle de Dani Lary vont dans le même sens, pour les grandes illusions.

Je pense que la magie se porte plutôt bien ces dernières années.

La facilité actuelle pour se procurer des cassettes et DVD permettant d’apprendre en quelques minutes des effets contribue certainement à former beaucoup de personnes, croyant devenir de grands ou de bons magiciens. Mais elle contribue surtout à trier naturellement sur le volet ceux qui s’aideront de bonnes informations pour devenir à leur tour de vrais artistes, tandis que ceux qui tenteront la reproduction sauvage, mourront « virtuellement », faute de talent.

Le support vendu (que ce soit en bouquins, vidéos, notes de conférences,…), n’apportera jamais plus, à mon sens, qu’une partition musicale précise d’une oeuvre qui reste à être jouée avec talent par un artiste.

La magie, étant un art selon moi, ne pourra se trouver « reproduite » avec brio par de faux artistes.

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En ce qui concerne le fait qu’un « non artiste » reproduise le morceau de magie d’un autre et fasse du tort aux vrais artistes, là encore je ne le crois pas. Ne dit-on pas souvent qu’un proche ou un ami qui a vu un tour avec un FP effectué comme un cochon s’étonne de votre tour, qui lui ne se fait pas avec le gimmick dont il s’agit ? Tout cela pour dire qu’un ustensile, une technique, un tour, ne peuvent se comparer entre les mains d’un expert et celles d’un « boucher/magicien ». Je respecte la profession des bouchers mais je fais plus allusion aux magiciens qui couperaient un jeu de cartes comme le boucher lorsqu’il découpe un morceau d’aloyau.

Faire rêver en magie est extraordinaire ! Pour parler de mon expérience, j’ai obtenu de pas mal de spectateurs des réactions de plaisir et je ne vous dis pas le bonheur intérieur que cela procure. J’ai toujours poursuivi ce chemin : pouvoir créer de réelles émotions en faisant de la magie, ce qui n’est pas monnaie courante, habituellement. Faire rire n’est pas trop difficile. Créer des mystères est notre tasse de thé à tous… Alors il me fallait trouver d’autres moyens de créer des émotions. Je suis très heureux d’avoir trouvé des ressorts nouveaux pour donner au public des émotions. Vraiment heureux.

J’ai mis plusieurs années de recherches pour voir le public « entrer » dans les mondes que je fabrique à leur intention.

Le bonheur est tellement grand que j’inciterai sans relâche les magiciens à travailler dans ce sens.

D’autant plus que la recherche d’univers de fiction est sans fin, ce qui est extraordinaire pour celui qui veut s’en donner la peine. La quinzaine de spectacles que j’ai écrits ces dernières années, dans ce sens, prouve que le puits est sans fond.

 

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Dominique Duvivier

♣️ Magicien. ♦️ Maître de l’art du #CloseUp. ♥️ Créateur de tours et professeur. ♠️ Fondateur @ledoublefond et directeur de Mayette Magie.

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Un commentaire

  1. Analyse à laquelle j’adhère totalement.
    Juste quant aux magiciens, qui dépassent le simple fait d’être magicien, et qui font ressortir l’artiste qui est en eux, et qui, du coup, ne montrent plus de magie, mais de l’art, ne pensez-vous pas, que le public, à ce moment là, quand il s’aperçoit qu’il assiste non plus à un numéro de magie, mais à un numéro artistique, ressente une sorte de soulagement, comme si l’artiste arrivait à leur donner ce qu’au fond ils attendaient depuis bien longtemps ? Autre chose que de la simple magie ?
    En définitive, un soulagement de pouvoir enfin redevenir totalement enfant, pendant quelque minutes. ( parallèle avec votre article sur la notion de toujours être un grand enfant ).
    Amitiés.

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