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ETRE OU NE PAS ETRE… MAGICIEN

À partir de quand peut-on se définir comme étant magicien ?

Je vais donner mon idée en fonction du vieil adage « chacun a une opinion sur tout sujet », ce qui est normal après tout, non ?

Mais ce ne sera qu’une opinion, d’accord ?

Etre un magicien, c’est d’abord être quelqu’un qui va savoir bosser comme un malade (mais un malade qui a envie de progresser) dans beaucoup de domaines, et pas seulement magique. C’est un passionné, mais qui ne va pas rechigner à la tâche et qui a le goût du travail bien fait.

C’est quelqu’un qui va connaître l’histoire de la magie juste suffisamment pour se donner l’envie d’aller encore plus loin dans le domaine de l’art de la magie. Autrement dit, pas un savant de l’histoire magique, mais quelqu’un qui connaît raisonnablement ce qui a existé dans l’idée de ne pas s’y arrêter.

C’est quelqu’un qui, dans un premier temps, va travailler de façon égale différentes techniques de manipulation de close up et de scène pour appréhender ce que son corps va affectionner le plus naturellement. C’est très important, à mon avis : se familiariser avec un certain nombre de techniques de base, de trucages et autres ingéniosités dans tous les domaines de la magie, pour se donner le goût de l’effet net et sans bavure. Le goût du bel effet magique ! Au début il est loin d’être facile de connaître le type de magie qui nous convient le mieux et de trouver l’orientation de son chemin magique personnel. Je crois qu’au commencement il faut se diriger vers ce qui spontanément nous passionne le plus. On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre, hein ? Il faut profiter de ce désir intense qui nous anime au début. Lui permettre de s’exprimer. Ensuite, on peut expliquer « à soi-même » qu’il est plus judicieux de faire plutôt ceci que cela. Et ensuite seulement, on peut accorder de l’ampleur à sa passion en lui donnant plus de fondements. On garde la fraîcheur initiale de notre passion, tout en lui donnant un plancher plus raisonné. De toute façon, je crois que le choix est mouvant pendant un certain temps. Et ce n’est pas si grave. Choisir la bonne option du premier coup est rarissime. Il est tout à son honneur de se poser sans cesse des questions,  de tester toujours plein de choses et d’avoir peur de se tromper de direction. Ces soucis traduisent la sincérité de sa recherche et le manque d’ego surdimensionné. Bon signe ça !

 

Ensuite vient la phase du travail en profondeur pour trouver SA magie. SA propre force d’expression.

IlDominique DUVIVIER s’agit déjà de devenir capable de construire ses tours pour qu’ils deviennent des pièces de théâtre et non un déballage de virtuosité. Pour cela, rien de tel que de connaître le travail de grands magiciens qui sont de véritables artistes et pas nécessairement des experts en manipulation, sous forme de livres, vidéos ou dans l’idéal en « live » quand c’est encore possible. Quelques personnes me viennent à l’esprit comme modèles : Fred Kaps, Ricky Jay, Juan Tamariz, Tom Mullica, Gaëtan Bloom, Albert Goshman… et quelques autres bien sûr mais pas tant que cela quand on y réfléchit !!! Regarder ces grands artistes bouger sur scène, les regarder être et les regarder se comporter avec le public, saura inspirer le magicien « étudiant » vers un chemin ouvert, libre et orienté vers le jeu, la comédie… L’exemple de ces grands maîtres dans la matière l’aidera à devenir un comédien/magicien, un « entertainer » et non un simple manipulateur.

D’ailleurs, bien évidemment, il ne faut pas s’arrêter au domaine de la magie pure : pour moi, trouver SA voie en tant que magicien, passe par l’inspiration que peut nous apporter toute forme d’art en général : le cinéma, la lecture, le théâtre, le cirque, la musique… L’idée est de trouver ce qu’on a envie de dire et que les techniques magiques n’en soient que le moyen d’expression.

Pour ce qui me concerne, l’envie de jouer la comédie, dans le sens de faire rire le public, a joué un rôle déclencheur : c’est ce qui a véritablement décidé de ma vie d’artiste. Quand on assiste à un de mes spectacles, le rire est donc fréquent, mais cela n’empêche pas la technique d’être omniprésente. Pour autant on ne se dit pas : « Oh la la, je ris sans cesse ! ». Ni « Oh la la, quelle technique ! ». (Je parle pour un spectateur lambda). On est juste embarqué, comme dans un bon film par exemple (du moins je l’espère et, en tous les cas, c’est mon but). Si je vois qu’une technique utilisée est ressentie comme une action et non comme une technique, je commence à croire que je suis sur la bonne route. Si je sens que le public décolle avec moi pour rejoindre mon univers, je sens un truc positif.

De manière générale, l’idée est de devenir soi-même. Un vrai magicien pour moi, c’est ça : quelqu’un qui a réussi à devenir lui-même. Pas une copie de quelqu’un d’autre, ou un mouton de Panurge qui suit juste les tendances du moment.

Dans mon petit coin, si, par exemple, je crois de bonne foi reproduire le tour d’un magicien, alors qu’en l’effectuant on me dit que ce n’est plus le même tour, je considère que je suis a priori sur la bonne voie… Vous voyez ce que je veux dire ?

De même, si l’ensemble de mes confrères du moment se trouvent déroutés par ce que je fais, je me sens aussi sur la bonne voie.

Faire comme tout le monde est rassurant. Faire partie d’une meute est assez confortable pour son ego. Mais, ce que l’on gagne d’un côté est souvent perdu de l’autre. Un artiste, c’est quelqu’un qui prend des risques ! Comme dit Lino Ventura dans le film de Lelouch « La Bonne Année », alors qu’on lui demande comment il choisit un film : « Je prends des risques, comme quand je choisis une femme ! ».

 

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Dominique Duvivier

♣️ Magicien. ♦️ Maître de l’art du #CloseUp. ♥️ Créateur de tours et professeur. ♠️ Fondateur @ledoublefond et directeur de Mayette Magie.

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9 commentaires

  1. Quelle chance de t’avoir….! 🙂
    Pour moi, même si c’est un peu tard pour la magie, sur le plan humain j’apprends à transposer et remettre en jeu certaines choses et en cela le questionnement est au rendez vous…
    Par contre pour les jeunes ou moins jeunes 😉 qui sont sur le fil du choix, de LEUR choix, quel bonheur de lire ces lignes j’imagine.
    Plus je m’intéresse à la magie, plus j’ai du respect pour les artistes.
    Le travail,l’implication, la volonté, la certitude ET l’incertitude et que sais je encore qui doivent vous habiter forcent encore et encore mon admiration !! :-))
    Très amicalement
    Cavaflar

  2. Cher Dominique
    Merci pour toutes ces belles vérités. J’aimerai avec ton accord publier ton texte sur mon site internet de mon école de magie. Il est actuellement seulement en allemand, mais d’ici 2 ou 3 semaines il y aura une version française.
    Merci pour ta réponse
    Amitiés
    Pierre

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