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Savez-vous que vous allez dépasser cette semaine les 100 000 pages vues depuis le début sur ce blog ? Vous faites exploser les statistiques ces derniers temps, c’est fou !

Merci  à TOUS pour vos visites, vos nombreux messages et commentaires que vous m’envoyez. Je ne réponds pas toujours à vos interventions, mais sachez que j’en suis toujours très honoré.

Je vois que mes petites notes hebdomadaires vous intéressent, vous font réfléchir… ne vous laissent pas indifférents quoi ! C’est le bonheur. Quelle chance de partager tout cela, n’est-ce pas ?

Avec toute mon amitié

Bien sincèrement

Votre serviteur

Dominique Duvivier

PS : ci-dessous un commentaire reçu de la part d’Ohdaesu avec mes réponses !

Ohdaesu : « Tout d’abord merci beaucoup pour cette réponse encore une fois extrêmement riche, à chaque fois cela me permet d’avancer un peu plus, d’ouvrir de nouvelles pistes de réflexions ou de remettre en question mon propre fonctionnement magique. Et pour tout cela : merci beaucoup ! Je te relance donc puisque tu m’as relancé… « Attention, c’est parti (ça va virer encore dans tous les sens je te préviens ^^).

Dominique Duvivier : Un morceau de réponse : garder l’esprit du débutant, ne pas se laisser aller à admettre que « les dés sont jetés » et continuer de croire qu’ici-bas, il y a toujours du grain à moudre, quoi qu’il arrive ! »

Tu as répondu à une question que je me reposais justement il y a quelques jours : je trouve la démarche extrêmement intéressante, je remarque souvent que quand je réfléchis d’abord en terme technique dans une démarche créative (au sens avec mon bagage magique), les résultats sont souvent assez décevant (rime ^^), la technique, les connaissances ont quelque chose de terriblement limitant (rime^^, bon ça suffit !), elle empêche d’aller au-delà de ce qu’on connait déjà d’une certaine manière. Donc je suis entièrement d’accord quand tu dis de garder l’esprit du débutant : avoir un regard vierge ça permet d’aller autre part, c’est comme écrire sur une page blanche… Mais toi, justement, comment gardes-tu cet esprit de débutant ? Comment mets-tu cela en pratique lorsque tu crées ? (la question est peut-être vague, peut-être n’a-t-elle pas de réponse qui sait…)

 

 Dominique Duvivier : Cela demande, en effet, de passer à la vitesse « amnésie », si l’on peut qualifier la chose de cette façon. Quand je tente de créer du « nouveau », si je reste conscient de ce que je sais déjà, de ce que j’ai glané depuis une petite cinquantaine d’années auprès de mes confrères et de moi-même, j’aurais beaucoup de mal à me lancer dans une recherche tous azimuts. Pour un créateur, quel que soit son domaine, cela représente une grande difficulté de « bafouer » les conventions… je dirais en particulier pour des disciplines comme la magie dont les représentants semblent si friands de conserver les choses, juste histoire de les conserver ! Leur pression est immense et souvent, nous en sommes les victimes inconscientes. Quand tu crées (ce qui est déjà suspect pour le commun des « chercheurs » magiques), tu te dois d’explorer des terrains opposés aux us et coutumes. L’effet doit être le but le plus important, pas la méthode utilisée pour obtenir l’effet. Et si tu regardes autour de toi, tu constateras que, pour beaucoup de magiciens, l’effet est souvent accessoire, c’est la méthode qui les intéressent le plus, n’est-ce pas ? Je suis conscient que je force le trait, mais je crois que tu comprends ce que je veux dire de toute façon… Par exemple, « L’Imprimerie », qui est le tour que j’ai le plus vendu au monde… Si tu savais ce que ce tour a suscité comme polémiques, tu serais ébahi ! En 1973, lorsqu’il est sorti, on m’a à peu près tout dit : mauvais, débinage, anti-magique… Et même maintenant que le tour est intégré dans le « répertoire » des magiciens, on va jusqu’à dire qu’il n’est pas de moi ! Un comble ! Si on regarde de près ce tour, on constate que je ne me suis pas embarrassé, ni laissé embarrasser, par le fait qu’on voit des cartes double faces, demi-face… et c’est justement ce que certains confrères m’ont reproché, n’ayant pas vu le côté créatif de la routine, mais juste des cartes que nous utilisons par ailleurs… pour faire choisir des cartes (hop) ! Ma démarche de l’époque était bien sûr à l’opposé de cette façon de voir : par exemple, si je frotte une carte et qu’elle s’imprime à vue avec la face de l’autre, C’EST PARCE QUE JE SUIS MAGICIEN. Si un spectateur reproduit ensuite la même expérience, les cartes restent « bizarres » (par exemple double faces) PARCE QUE LUI N’EST PAS MAGICIEN ! Voilà la démonstration de pourquoi et comment on va dans un sens et pas dans un autre. Quand je cherche, je ne me dis jamais que « ça ne se fait pas ». Je me dis que tout peut se faire et que c’est à moi de motiver la chose par ce que j’appelle souvent un « gimmick verbal » : un texte ou un scénario qui va rendre crédible mon effet. Bref, je ne vais pas demander à Marlo si j’ai le droit de penser !! Tu vois l’idée ?

 

 

Ohdaesu :

Dominique Duvivier : « Ne pas avoir la grosse tête, c’est une des choses les plus importantes à prendre en considération, si l’on veut progresser ! J’aime utiliser les classiques de la magie, mais aussi explorer de nouveaux horizons. C’est en parcourant ces deux tendances, qu’il m’arrive de trouver du neuf qui ressemble à de l’ancien en apparence mais qui, du coup, est vraiment du neuf ! La nouvelle version créée est vraiment novatrice ou bien simplement enrichie, mais, dans tous les cas, elle redonne un coup de jeune à d’anciennes idées ! »

Justement je pensais à ça, je regardais il y a peu l’entretien sur ton excellent dvd d’Intimiste avec les membres d’LSP (ça me motive quand j’ai un petit manque d’inspiration 😉 ) où tu dis justement que « tu ne travailles plus depuis longtemps sur la technique mais sur les effets contrairement à beaucoup d’autres », je trouve que cette réflexion colle particulièrement bien à la situation : le plus dur en somme ! Comment t’y prends-tu pour faire du neuf ?

           

Dominique Duvivier : J’ai déjà commencé à répondre ci-dessus, mais je peux t’en dire plus… à l’infini ! J’ai bâti ma vie avec cette notion. C’est elle qui me fait vivre, exister. Je trouve d’ailleurs incroyable de voir que je parle de tout cela depuis trente ans et que très peu de personnes ont tenu compte de ce que je dis. Comme quoi ! Ce qui est le plus étrange est qu’on me demande tout  le temps comment je fais…

 

 

Ohdaesu :

Dominique Duvivier : « Le tour de « La carte folle » est devenu un classique avec Peter Kane, dans la seconde partie du XXème siècle. Mais la tendance est restée figée selon moi. J’ai eu envie de la pousser un peu hors de ses limites. J’ai créé plein de versions au cours des dernières années et, si tu voyais la nouvelle mouture que j’ai imaginée pour mon dernier spectacle « Le hasard, c’est moi », tu y verrais une illustration encore plus éclatante de ce que je crois qu’on peut obtenir, dès lors qu’on ne s’embarrasse pas de préjugés, en ce qui concerne la création. Lorsqu’on crée, il faut savoir travailler sans se dire qu’il ne faut pas emprunter tel ou tel chemin parce que « ça ne se fait pas ». Si on se laisse aller à la création, tout peut se faire, tout est possible. Ensuite il faut trier, mais, sur le moment tout peut se tenter. »

Cet exemple est intéressant en effet, la carte folle, quand on voit ne serait-ce que la version que tu exécutes dans Intimiste 1 (au passage j’attends avec impatience le second opus vivement le papa Noël ^^), certes, le départ au niveau de la configuration ressemble au classique mais quelques secondes plus tard on part autre part, dans un autre tour, hybride, avec les cartes au portefeuille, les neuf cartes, la jeu solide… La folie quoi ! Loin de la carte folle version Peter Kane (qui est très bonne cela va sans dire). Quel fil t’a mené du classique à un tout autre tour ? Comment constitues-tu ce chemin magique ? (Pour ta version dans le hasard c’est moi, j’espère la voir vite dès que je viens sur Paris, une tuerie surement :)) Comment pars-tu en vrille et sélectionnes-tu au final ce que tu garderas ?

 

Dominique Duvivier : Ma peur de manquer, comme je l’ai dit souvent, explique bien des choses. Etant né en 1950, je pense que c’est ma mère qui me l’a transmise dans son ventre à cause des privations nombreuses de l’époque (la guerre était bien sûr finie, mais les tickets de rationnement n’ont disparu que vers 1948/49). Ma naissance et mon enfance coïncident avec la fin d’une période très dure, tant au niveau approvisionnement qu’à plein d’autres niveaux. D’ailleurs, sans faire du « Zola », mon enfance a été très heureuse mais plutôt miséreuse… Donc ma réponse inconsciente a toujours été de chercher la profusion dans toutes choses que j’entreprends, pas seulement magiques du reste ! Pour reprendre l’exemple de «La carte folle » : c’est un tour qui m’a plu dès le départ, m’a séduit par son côté « fou », mais très vite le concept de changer des cartes X en cartes Y, ne m’a semblé qu’être un bon départ, juste un bon départ, alors que, pour bon nombre de mes contemporains, c’était déjà le top du top ! Je ne critique pas mes confrères, je ne cherche pas à me vanter, je dis simplement qu’eux n’ont peut-être pas eu les mêmes soucis pour bouffer que moi dans leur enfance. Tu comprends ? J’ai très vite eu envie d’augmenter l’impact de « La carte folle » : j’avais la sensation que, sinon, mon tour allait se comprendre, qu’il était trop basique… Alors j’ai trouvé par exemple des gestes nouveaux pour changer les cartes, j’ai cherché mille façons de faire exploser la base de l’effet, de manière à me donner les « coudées franches » pour exprimer pleinement ma routine, sans  avoir peur d’être compris par le premier magicien venu ou le spectateur perspicace du coin ! Comme tu as dû le remarquer, dans ma magie, je désire plus que tout que mon public ne s’attende pas à ce qui va se passer pour pouvoir l’emmener ailleurs. Je fais en sorte de me donner le temps de l’emmener ailleurs. S’il suit le déroulement technique de mon tour, je ne pourrai pas m’exprimer pleinement et cela m’angoisse !!! Mes créations sont d’ailleurs souvent nées de mes angoisses. Le truc du poète maudit d’une certaine façon ! Comme je le dis souvent, si j’avais été toujours aimé de mes confrères, je n’aurais pas été aussi productif, si boulimique de travail, si acharné dans mes recherches sur les effets, les tours, les shows… Dès qu’on m’empêche de m’exprimer d’une façon ou d’une autre, je trouve des choses assez folles (cartes folles ?)… ! On ne trouve pas des choses « déviantes » si ce qui se voit, ce qui se fait, nous convient tel quel ! Nous avons tout à gagner à croire que les choses établies ne sont pas faites pour le rester et nous deviendrons de nouveaux créateurs redoutables !!!

Voici un peu de grain  à moudre.

A++.
Dominique

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Dominique Duvivier

♣️ Magicien. ♦️ Maître de l’art du #CloseUp. ♥️ Créateur de tours et professeur. ♠️ Fondateur @ledoublefond et directeur de Mayette Magie.

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3 commentaires

  1. Bonjour Dominique.
    Tout d’abord, je me permets de me présenter : Alexandre, grand débutant très très intéressé par la cartomagie.
    Le néophyte que je suis a deux questions pour toi (probablement déjà posées quelques trouzaines de milliers de fois).
    La première est une question ouverte. Il y a quelques semaines, j’ai acheté, sur les conseils de Quoc Tien, les 4 premiers DVD de l’école de la magie (ainsi qu’une imprimerie, mais cela fera l’objet de ma deuxième question).
    Je suis très satisfait de mon achat, et la seule chose dont je pourrais à la limite me plaindre est que mes doigts n’apprennent pas aussi vite que ma tête !
    Je suis actuellement au troisième tome, et je me demandais si tu aurais l’extrême gentillesse de me conseiller une bibliographie réduite (et trouvable, de préférence) pour aller un poil plus loin ? D’autre part, saurais tu si il est possible de trouver des rééditions de grands classiques (par exemple du 20$ manuscript de Dai Vernon ?) ?
    Ma deuxième question concerne l’imprimerie. C’est un tour que je trouve très graphique (dans sa version complète), et j’apprécie particulièrement de finir clean (ce qui aujourd’hui m’intéresse le plus, dans la magie, est d’utiliser autant que possible des objets « ordinaires » et de pouvoir autant que se peut remettre les objets à l’examen à la fin du tour, je trouve que cela renforce l’effet « magique ». Mais ce n’est que l’avis d’un débutant !). Je comprends à peu prés autant l’accusation de débinage à son encontre que mon chat comprend les principes avancés de la thermodynamique. Je ne vois pas le débinage dans le fait de remettre à l’examen des cartes magiquement transformées. Y a t il eu une seule critique vraiment argumentée sur ce tour (en dehors de l’e*****ge de mouche sur le nombre de cartes, qu’il est facile de régler avec la formule magique présentée sur le troisième tome de l’école de la magie) ?
    Par extension, tous les magiciens bien confirmés parlent d’ennemis. Mais pourquoi donc, par la sainte brouette, y a-t-il des ennemis ? Ces gens n’ont-ils pas autre chose à foutre ?
    J’ai probablement dit de grosses bêtises dans mon babillage de néophyte de la magie, j’espère que tu ne m’en tiendras pas rigueur. Et si jamais tu as le courage d’y répondre, sois assuré de ma gratitude la plus sincère.
    Salutations !

  2. Merci pour ces échanges constructifs. On ne peut s’empêcher de faire le lien avec vos propos qui sont sur le deuxième dvd explicatif d’Intimiste 2. C’est une approche totalement différente et anti-conformiste qui nous donne BEAUCOUP de grains à moudre (j’aurais dû faire torréfacteur ;).
    Et c’est un véritable tour de force que de casser la « tradition ».
    Récemment j’ai publié sur mon blog un « essai », qui vaut ce qui vaut, simplement pour coucher sur le papier comme on dit mes idées sur la notion de créativité et la manière de la travailler. Ça aide d’écrire mine de rien et ça évite à son propre esprit de perdre le fil… Et après avoir lu et entendu vos mots et réflexions quelques jours plus tard, j’en suis resté sur le … l’arrière train… Dans le bon sens du terme ! 🙂 La route est longue, mais qu’est-ce que c’est grisant !
    Ce que je trouve personnellement passionant, c’est toute la démarche créative, la construction d’un tour, ses versions (à la manière de Tamariz dans « Sonata »), l’histoire des objets que vous utilisez. Ma compagne me demande toujours comment je peux rester des heures à regarder le même dvd en boucle ! C’est pour justement bien comprendre les choses. Nous ne sommes encore que des enfants magiciens dans l’expectative de ce que nous montrent et disent nos ainés.
    Dans tous les cas, merci d’exister ! 🙂
    Maintenant, j’aurais quelques questions plus concrètes à poser, histoire de faire avancer le Schmilblick. Mettons-nous dans la peau d’un débutant averti (quelques mois ou années de pratique, autodidacte, amateur dans le sens où ce n’est pas son métier et pratique essentiellement auprès d’un public restreint à petite échelle, mais qui est un passionné <= très important !). Il connaît les "classiques" justement, les réalise "à la manière de" et pour aller un peu plus loin a simplement modifié le texte et la présentation, afin que cela lui corresponde plus. Techniquement, pareil, il connait les classiques et les réalise a priori correctement. Comment doit-il s'y prendre pour passer le cap du "mon public ne s’attend pas à ce qui va se passer pour pouvoir l’emmener ailleurs" ? Comment se détacher de toute cette tradition très (trop) souvent enseignée et apprise par les livres ou dvd ? Une question extrème : doit-on connaître cette tradition pour pouvoir mieux aller à son encontre ou ne devrait-on pas plutôt apprendre dès le début de manière différente la magie au sens large ? C'est un peu comme apprendre à lire. Nos parents n'ont pas appris comme nous et pourtant on y arrive tous les deux. Le magicien grâce à la présentation du tour peut permettre au spectateur de l'emmener quelques instants dans une histoire, dans un imaginaire. Mais est-ce vraiment suffisant pour se détacher pleinement de la technique (mon intuition me dit que non, mais je ne sais pas pourquoi...) ? Bonne soirée ! (enneigée et glaciale ! 🙂

  3. Bonjour Dominique, j’ai eu une semaine assez mouvementée donc je n’ai pu venir plus tôt pour répondre … :$ (recherche de restaurants pour tablentabler dans la joie z’et la bonne humeur et même l’allégresse 😉 ) c’est honteux de ma part :$ Je voulais te remercier énoooooooooooormément pour ta réponse passionnante que je commenterai demain vu que j’aurai enfin du temps :)Je voulais tout de même te remercier encore du fond du cœur pour tes passionnantes réflexions et pistes ouvertes auxquelles je répondrai au plus vite c’est à dire donc demain ^^
    Merci pour tout Dominique 🙂
    Ohdaesu

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